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Toxic food

Extrait de Toxic Food, le livre de William Reymond :

 » Déclin.

Jamais l’expression ne m’a paru si juste.

L’Amérique, déjà difforme, est bien malade de sa toxic food.

Malade à en crever même.

Il faut le répéter encore et encore : l’obésité est uniquement la face visible du mal. Pour mesurer l’ampleur de la crise, il faut plonger dans la liste des dix principales causes de décès aux États-Unis. Et constater que les dégâts liés au mode alimentaire américain trustent ce terrifiant palmarès.

En première place figurent toujours les maladies cardiaques, dont la majorité découle d’une nourriture trop riche en sucres, graisses, sel et… produits industriels. Viennent ensuite les cancers, pour beaucoup – nous le verrons – déclenchés par des facteurs environnementaux où l’alimentation occupe une place de choix.

Plus étonnant, les soins médicaux arrivent à la troisième place de cette liste. Près de 110 000 Américains décèdent en effet chaque année des effets secondaires d’un médicament.

Quel rapport avec la toxicité de l’alimentation ? Il est simple et compliqué à la fois.

Le premier niveau d’explication est lié à notre attitude face à la maladie. Nos sociétés – et pas seulement de l’autre côté de l’Atlantique – ont pris la mauvaise habitude de vouloir trouver une réponse médicamenteuse à tous les problèmes nés du contenu de nos assiettes. Résultat ? L’hypertension, le cholestérol, le diabète et autres tracas suscités par la nouvelle malbouffe sont presque exclusivement traités via des prescriptions médicales. Ce qui fragilise l’organisme et n’est pas sans répercussions sanitaires. Le recours aux « solutions » apportées par l’industrie pharmaceutique chez des patients de plus en plus jeunes entraîne en effet à terme une surconsommation permanente de pilules et autres cachets. Or ce sont ces malades-là, ceux qui jonglent avec les gélules et ajoutent malgré eux du chimique à une nourriture déjà saturée de ce genre de substance, qui apparaissent en tête de liste des décès surprenants.

Le second aspect de l’explication, plus complexe, touche à la sorte d’« abandon psychologique » que crée ce recours aux prescriptions comme solution miracle. Il est ainsi fréquent de voir des malades, rassurés par la « béquille » d’une poignée de pilules en cas de problème, continuer à engouffrer la nourriture industrielle à l’origine de leur mal. Des consommateurs qui, malgré leur traitement, meurent du fléau que la prescription était censée soigner.

Hélas ! cette réalité ne se limite pas à une simple « cohabitation », à une corrélation entre médicaments et toxic food. Typiquement américain, il s’agit plutôt d’un phénomène souvent poussé à l’extrême.

Au total, lorsque l’on ajoute les infections en milieu hospitalier, les erreurs de diagnostic et les interventions chirurgicales, près de 250 000 Américains décèdent chaque année après des soins médicaux.

Chandler, en Arizona, malgré son festival annuel de l’autruche (dans les années 1910, Chandler était un centre important d’élevage d’autruches, leurs plumes étant recherchées pour décorer les chapeaux des Américaines) et différentes installations du géant de l’électronique Intel, ressemble à des centaines de villes américaines. Celles que les touristes ne visitent jamais. Et pour cause : ici les longues avenues n’ont aucune âme, les chaussées sont défoncées et les panneaux publicitaires pullulent dans une complète anarchie. Chandler est située au sud-est de Phoenix mais pourrait se trouver à proximité de Dallas, Chicago, Los Angeles ou Pittsburgh. On en vient à se dire que traverser l’Amérique, c’est un peu être condamné à vivre, jour après jour, la même expérience. Renforçant cette impression, on remarque en effet les mêmes enseignes commerciales que partout ailleurs. Et, plus particulièrement, celles, criardes, de la restauration.

Comme à Rio Grande City, toutes les marques de junk food se sont données rendez-vous à Chandler. Toutes et une autre. Un cas unique. Un voyage vers le futur.

Situé à l’arrière d’une station-service, le Heart Attack Grill ( Littéralement « le grill de la crise cardiaque ») ne s’offre pas au conducteur lambda installé derrière son volant. Ici, aucun panneau publicitaire ne promet un éden alimentaire. Il n’y en a pas besoin, à vrai dire, puisqu’on vient dans l’établissement de Jon Basso en connaissance de cause. Son chiffre d’affaires imposant fait autant la réputation des lieux que son slogan choc : Heart Attack Grill, un goût bon à en mourir.

On pourrait sourire, mais Basso ne plaisante pas. Comme il le proclame fièrement sur sa devanture en forme de mise en garde, la nourriture vendue ici est « mauvaise pour la santé ». Et l’inventeur du concept sait de quoi il parle : ancien nutritionniste puis gérant de salles de sport, il a compris, en 2005, qu’il y avait plus d’argent à gagner à flatter les mauvaises habitudes alimentaires des Américains qu’à tenter de les corriger.

Son restaurant, unique en son genre, est né de ce constat. Et son menu l’illustre à merveille, si je puis dire. À cause des énormes hamburgers qui ont fait la réputation du lieu, mais aussi du reste.

Les boissons d’abord.

Le Heart Attack Grill est l’un des rares fast- foods vendant de l’alcool. De la bière bien sûr, mais aussi des produits beaucoup plus forts.

Ensuite, il y a le Coca-Cola. Importé du Mexique voisin, le soda est proposé dans sa version pur sucre. Car, comme l’explique Jon, les produits à base d’edulcorants sont bannis. Non parce que Basso s’inquiète de leur composition chimique, mais parce que, dit-il, plus pauvres en calories, ils ne correspondent en rien à la philosophie des lieux.

Depuis peu, une nouveauté est apparue : le Jolt Cola. Cette boisson, sorte de Coke sous amphétamines, est le soda le plus riche en caféine du monde. Déconseillé aux enfants, femmes enceintes et personnes âgées, le Jolt est réputé pour le coup de fouet, les frissons et tremblements qu’il procure.

La suite est à l’avenant.

Le menu créé par Basso propose par exemple des… cigarettes. Qui, bien entendu, conformes au discours de l’établissement, sont vendues uniquement sans filtre.

Les frites ne sont pas en reste. Disponibles à volonté en self-service, elles sont fort généreusement saupoudrées de sel. De plus, gratuitement, le client peut les recouvrir de fromage fondu. Mais c’est en cuisine que ces pommes de terre ont subi leur pire modification. Au Heart Attack Grill, les flatliners fries ne sont en effet pas cuites dans le traditionnel bain d’huile mais uniquement dans du saindoux !

Le saindoux, le Heart Attack Grill en consomme plus de deux cents kilos par semaine. Car, en plus des frites, Jon en met dans ses trois cent cinquante hamburgers vendus quotidiennement. Chaque pain se voit ainsi badigeonné de gras de porc rendant le produit final encore plus fondant.

Les hamburgers sont donc le plat de résistance du restaurant.

Il en existe quatre modèles. Dont le plus cher et gros frôle les treize dollars et atteint les… huit mille calories. Non, non, il ne s’agit pas d’une erreur de frappe. Chez Jon, le « quadruple » – c’est son nom – offre l’apport calorique conseillé à un homme adulte pour trois jours. Les mensurations du monstre sont à la hauteur du massacre diététique. En plus de ses deux brioches au saindoux, il contient huit tranches de fromage et quatre steaks hachés d’un poids approchant le kilo de viande. Un oignon – que l’on peut commander frit – vient agrémenter le tout. Autre option : vingt-quatre tranches de bacon…

Seules les quelques feuilles de salade habituelles à la recette du hamburger manquent à l’appel. Non par oubli ou erreur mais parce que Jon a décidé, et revendique, de commercialiser le pire de la junk food. Et uniquement cela.

Basso vend également différents t-shirts souvenirs hautement revendicatifs. Point commun entre tous, aucun n’est fabriqué dans une taille inférieure au XXL et tous sont disponibles jusqu’en taille 10XL.

Cette promesse, cet engagement même de commercialiser le pire de la junk food, ainsi que les risques sanitaires qui les accompagnent, sont au cœur de la stratégie de Basso. N’a-t-il pas imaginé un décor pour son petit restaurant de quarante tabourets qui ressemble à une salle d’hôpital ?

Ici, les serveuses sont en effet des « infirmières ». Qui revêtent l’uniforme, une tenue blanc et rouge agrémentée d’un décolleté profond pour séduire la clientèle essentiellement masculine. Les clients pour Jon – qui porte, lui, une blouse blanche et se fait appeler docteur – sont des « patients ». Et leur commande, une « ordonnance ».

Le gimmick médical est utilisé jusqu’à la nausée. À la fin du repas, les infirmières prennent souvent la tension du patient. Il faut reconnaître, ceci dit, qu’engouffrer l’équivalent de neuf repas en une dizaine de minutes affecte terriblement l’organisme. C’est pour cela du reste que les patients sont raccompagnés en fauteuil roulant jusqu’à leur voiture !

Quant aux noms des hamburgers, ils sont à l’avenant. Le simple s’appelle le « pontage » et, logiquement, le monstre aux huit mille calories le « quadruple pontage ».

Ces appellations ne relèvent pas seulement de la bonne idée marketing. Car les noms des burgers du Grill sont à la hauteur des risques encourus. Comme le dit Basso, sourire aux lèvres : « Si vous mangez chez moi tous les jours, cela va vous tuer. »

La remarque fait sourire les « patients ». Ici, chacun semble assumer le plaisir de se nourrir à l’extrême et classe le conseil du « docteur Jon » dans la catégorie des boutades.

De fait, la clientèle du Heart Attack Grill est en majorité constituée d’habitués. Et d’obèses. Qui, bien souvent, mangent gratuitement. Pourquoi ? Parce que s’il le désire chaque patient se voit pesé à son arrivée. Et, s’il dépasse les cent soixante kilos, devient l’invité de Basso.

Reste que les hamburgers trop grands pour tenir dans une main et les clients à deux doigts de vomir, le front luisant de transpiration et les joues barbouillées de saindoux, ne sont pas ce qu’il y a de plus choquant dans le petit restaurant de Chandler, Arizona.

Non, comme un affreux écho à ce que j’écrivais plus haut, le plus scandaleux, c’est de constater que les « patients » de John avalent des pilules avant de se lancer à la conquête de ces Everest du pire.

La clientèle du Heart Attack Grill, malade à en mourir, se dope en effet aux médicaments anti-cholestérol et autres régulateurs de tension dès qu’elle met un pied dans l’établissement. Une sorte d’antidote – fictive – avant de s’abandonner sans remords à un orgasme de gras.

Jon Basso est un entrepreneur ambitieux. Ayant découvert, grâce à ses anciennes activités, la pandémie d’obésité, il en connaît les mécanismes et, aujourd’hui, les transforme en recettes de son propre succès. Un succès que le « bon docteur » songe à développer, étendre même. Aux États-Unis, bien entendu, vaste territoire. Mais Basso a une autre idée en tête. Sachant que la polémique est un solide vecteur de ventes, il vise quelques villes emblématiques. Au programme, Hollywood, La Nouvelle-Orléans et Rio de Janeiro. Et, si tout fonctionne comme prévu, dans quelques années Amsterdam et… Paris.

Bon appétit. »

La suite …………….demain.

Dr BUENOS : Les USA nous fascineront toujours par leur démesure. Mais au delà du côté original et bien pensé du Heart grill attack, on voit apparaître une dimension désespérée, voire suicidaire qui elle, est effrayante.

 

 

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Extrait du livre Toxic Food de William Reymond :

 » Toxic food.

L’analyse de Kelly Brownell rejoint les conclusions de mon enquête sur la pandémie mondiale d’obésité, exposées dans Toxic.

Depuis trente ans, de conseils de régime en messages gouvernementaux, une seule idée a été martelée : nous sommes les uniques responsables de nos choix alimentaires et, par extension, les uniques coupables de la situation sanitaire actuelle.

Bien sûr l’expression « Nous sommes ce que nous mangeons » est juste. Mais, précisément, connaissons-nous vraiment les aliments qui garnissent chaque jour nos assiettes ? Disposons- nous réellement d’un libre arbitre pour les choisir ?

Évidemment non. Dans Toxic, j’ai énuméré tous les moyens, notamment publicitaires, utilisés par l’agroalimentaire pour influencer nos décisions, contourner notre raison, et nous inciter à choisir des produits qui, s’ils possèdent une forte plus-value, sont mauvais pour la santé.

J’ai raconté comment, jouant avec des réflexes et habitudes inscrits dans notre ADN, les géants de la nourriture industrielle modifient leurs recettes pour satisfaire des instincts primaires contre lesquels il est impossible de lutter.

J’ai démontré comment ces mêmes compagnies investissent dans la recherche neurologique afin de mieux comprendre les mécanismes du cerveau et, à terme, prendre à revers ses défenses pour imposer leurs plats et produits.

J’ai dit également combien, à titre personnel, les centaines d’heures passées dans un club de sport n’avaient pu effacer les kilos gagnés pour cause d’installation aux États-Unis. Un échec d’autant plus incompréhensible qu’il était – je le croyais alors – accompagné d’un mode alimentaire sain. Ou, pour être plus précis, et conforme à la définition de la malbouffe chère à José Bové, un mode alimentaire dépourvu de la moindre visite dans les établissements de restauration rapide.

C’est la nécessité de comprendre ce décalage, ce hiatus même, qui m’avait poussé à ausculter le contenu de nos assiettes, à partir à la poursuite des ingrédients comme le sirop de fructose- glucose ou l’huile partiellement hydrogénée qui, à notre insu, sont ajoutés à la nourriture.

Au terme de cette première plongée dans le grand bain de la mauvaise bouffe, j’étais ressorti avec une certitude : depuis trente ans, nous étions victimes d’un gigantesque mensonge.

Les kilos en trop, la pandémie d’obésité, les amputations compliquant le diabète, les « cancers de l’alimentation », les taux de cholestérol explosifs et les problèmes cardiaques démultipliés ne sont pas de notre responsabilité mais des effets dévastateurs du système économique qui produit notre nourriture. Ou, comme l’aurait écrit Kelly Brownell, la toxic food.

Mais Toxic a effleuré la surface. Comme je l’avais perçu sur le plateau québécois de Tout le monde en parle, il convenait d’aller au-delà, de pousser la réflexion plus loin, d’enquêter plus avant.

Durant la promotion de l’ouvrage, je n’ai eu de cesse de répéter que la pandémie d’obésité était la partie visible de l’iceberg. Mais, inlassablement, les mêmes remarques et conclusions émergeaient. Toutes construites à l’aune de la définition restrictive de la malbouffe, telle que théorisée par le mouvement altermondialiste.

Or notre perception était incorrecte.

Car le problème se révèle bien plus vaste, le mal beaucoup plus insidieux.

Il fallait, en somme, remettre le couvert.

Et, entre manifeste, enquête et exploration, commencer là où la toxic food a vu le jour. »

La suite …………..demain

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Extrait de Toxic Food, le livre de William Reymond :

« Le temps du changement est aujourd’hui venu.

Trente ans après la création du néologisme malbouffe, trente ans après l’apparition du premier McDonald’s en France et dix ans après le démontage de Millau, il convient de regarder la vérité en face.

Et admettre l’immensité de notre échec.

Car la malbouffe, expression à tiroirs, est désormais un concept caduc, un terme dont le sens évolue au gré des agendas politiques et des inquiétudes populaires. Un combat – hélas ! – perdu.

Qu’on en juge. En 2009, alors que nos sociétés sont traversées par une nouvelle crise économique, McDonald’s affiche des résultats débordants de santé.

En France même, territoire de José Bové, le nombre d’établissements du géant américain a presque triplé en dix ans. McDonald’s possède aujourd’hui (en 2009) 1 134 franchises réparties sur 859 communes. Force est de l’admettre, le pionnier de Strasbourg avait vu juste.

Chaque jour, dans l’Hexagone, terre fétiche de la gastronomie et de l’art de vivre, un million de nos concitoyens engouffrent le menu hamburger- frites-Coca.

Pire, la tendance est à la hausse : + 11 % en 2008 avec 3,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Et certainement autant en 2009.

Mais il y a mieux – ou pire selon le point de vue.

Depuis l’épisode du démontage de Millau, la France s’est transformée en marché juteux pour le géant américain. Tandis que, dans son pays d’origine, là où la fréquentation est la plus large, le client moyen consomme pour trois euros de nourriture estampillée du plus célèbre logo de la planète, le Français fait mieux. Beaucoup mieux même.

Ainsi, avec une addition moyenne plus de trois fois supérieure à celle du consommateur américain, un ticket atteignant les dix euros par visiteur, la France occupe… la première place mondiale de la rentabilité par client.

Non, il ne s’agit pas d’une erreur : nous occupons bel et bien la plus haute marche du podium McDonald’s ! Devant les Américains !

Comme l’explique avec pragmatisme Éric Gravier, l’un des vice-présidents de la filiale hexagonale : « Les Français viennent moins chez nous que dans d’autres pays, mais ils consomment beaucoup à chaque visite. »

Si, dix ans après le coup de gueule de José Bové et la redéfinition du terme malbouffe, on ne considère pas cette réalité comme un échec majeur, il reste une dernière information hallucinante pour convaincre les sceptiques.

La France est pour McDonald’s, aujourd’hui, le deuxième pays le plus rentable au monde !

Une vérité aussi corsée qu’un bon morceau de roquefort qu’il ne sert à rien d’ignorer : en trente ans, malgré José Bové, nous nous sommes transformés en vache à lait du géant américain de la restauration rapide.

*

Le temps du changement est venu.

Aujourd’hui, notre échec ne se mesure pas uniquement à l’aune du triomphe hexagonal de McDonald’s. Il prend d’autres visages tout aussi inquiétants.

Désormais, le temps moyen passé chaque jour par une famille française pour préparer le repas flirte dangereusement avec le seuil des trente minutes. Soit beaucoup moins qu’avant ! Une tendance mondiale puisque, au Québec, ce temps est encore plus faible.

Désormais, 43 % de la population française est en surpoids. Avec près de 8 millions de cas, plus de 10% de la France est obèse. Pire, l’obésité infantile ne cesse de croître à un rythme inquiétant, proche de celui constaté aux États-Unis. Avec un taux doublant tous les dix ans, nous n’aurons bientôt rien à envier au mal qui gangrène le continent nord-américain.

 

Faut-il poursuivre ?

En 2009, en France, un adulte sur cinq est victime du cholestérol et dix millions de personnes souffrent d’hypertension. On compte aussi 2 millions de diabétiques – dont 8 000 sont, chaque année, amputés d’un membre -, un demi-million de cardiaques dont 170 000 décèdent de complications liées à leur état. Sans oublier, afin de conclure ce terrible état des lieux, qui vaut aussi pour la Belgique, l’Allemagne, les Pays-Bas, l’Espagne, le Canada, la Grande-Bretagne, les innombrables personnes atteintes de cancers directement liés à l’alimentation.

*

Le temps du changement est venu.

Et, avec lui, la nécessité de revoir la définition du mal qui nous ronge.

Oui, McDonald’s, Coca-Cola et consorts détiennent une part de responsabilité dans le développement de la pandémie d’obésité. Un rôle qui, malgré les discours rassurants des dirigeants de ces compagnies, n’est pas prêt de diminuer.

Oui, comme l’ont fait José Bové et d’autres, il fallait révéler publiquement les dangers de ce mode de consommation – et il faut continuer à le faire -, tant les périls encourus sont sanitaires et culturels.

Mais, en braquant les projecteurs de l’opinion, des médias et des consciences sur cet unique aspect de la crise, les nouveaux chiens de garde de la malbouffe nous ont involontairement aveuglés.

Car la malbouffe conceptualisée par Bové au lendemain de Millau n’est pas, à elle seule, responsable de nos santés déclinantes.

Le véritable coupable est ailleurs.

Différents indices le prouvent.

Lors de chacune de mes rencontres avec des victimes de la pandémie, qu’elles soient obèses ou atteintes d’un cancer du côlon, françaises ou américaines, mon constat fut identique : l’essentiel de l’alimentation de ces personnes ne provenait pas des enseignes de restauration rapide. Mieux – si je puis dire -, certains lecteurs touchés voient dans les maux les affectant une sorte d’injustice divine puisqu’ils ont depuis longtemps boycotté tout ce qui ressemble à un hamburger.

À tous, ma réponse a été identique : le véritable coupable est ailleurs.

Un coupable aussi obèse que ses victimes. Dont le surpoids se mesure en euros. Qui, en France, avec un chiffre d’affaires de 163 milliards d’euros, pèse deux fois plus que le secteur automobile et quatre fois plus que l’industrie pharmaceutique. Et qui, trente ans après la publication du livre de Stella et Joël de Rosnay, a conquis nos assiettes tandis que nous nous battions contre d’autres moulins à vent.

C’est l’industrie agroalimentaire.

Un monde qui, désormais, représente 80 % de notre alimentation.

*

Le temps du changement est venu.

Ce saut vers le passé en quête de l’origine des différents sens d’une expression médiatique était nécessaire.

En concentrant notre attention sur les risques hygiéniques de l’alimentation moderne puis sur le péril représenté par la restauration rapide, nous avons oublié les mises en garde initiales – et pourtant avisées – de Stella et Joël de Rosnay.

Au fil du temps, le concept de malbouffe a perdu de son sens pour devenir un terme fourre-tout qui, finalement, ne met plus en garde contre les vrais dangers auxquels nous devons faire face.

Aussi, trente ans après, pour décrire l’ampleur du péril, mieux vaut créer une nouvelle expression.

En 2004, Kelly Brownell, directeur du Rudd Center for Food Policy and Obesity à Yale et expert reconnu mondialement, publiait un ouvrage intitulé Food Fight : The Inside Story of the Food Industry.

Son livre, visant à découvrir les causes de la pandémie d’obésité, racontait un système où, finalement, le consommateur se retrouvait seul face à une alimentation industrielle de mauvaise qualité, qui plus est trop riche en calories, en graisse et en sel. Une offre disponible partout, peu chère et soutenue par un battage publicitaire permanent. S’ajoutant à d’autres facteurs environnementaux tels que la sédentarisation de nos modes de vie, l’augmentation de la taille des portions, les investissements colossaux en marketing et l’infiltration des écoles par les géants de l’agroalimentaire, cette nouvelle forme de malbouffe, bien plus vaste et complexe, se retrouvait selon lui à l’origine de nos maux.

Après le temps de la junk food et du fast-food, après de Rosnay et Bové, Brownell venait de mettre le doigt sur un nouveau péril.

Son nom ?

La toxic food. »

La suite ……. demain.

William Reymond n’a pas hésité à intituler son premier livre TOXIC et son deuxième livre TOXIC FOOD, au risque d’introduire une certaine confusion.

Mais, au fur et à mesure de son enquête, on constate l’ampleur des dégats de l’industrialisation de l’alimentation et sa responsabilité dans la pandémie d’obésité.

C’est pourquoi dans le réseau ROSA, nous ne pouvons pas imaginer une prise en charge de l’obésité qui ferait l’impasse sur cet aspect de la question.

 

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Toutes les personnes qui ont suivi le feuilleton quotidien de ce début d’été en lisant quotidiennement les extraits de Toxic de William Reymond , ont sûrement été déçues que cela s’achève et frustrées que cela s’achève fin 2006.

William Reymond a publié une suite : »Toxic Food » qui s’achève fin 2009 pour notre plus grand plaisir.

On se propose d’en reprendre la divulgation par petits extraits quotidiens. Les plus impatients pourront se procurer le livre ….

Dans ce premier extrait introductif, William Reymond explique pourquoi il a écrit une suite.

 

« En voyant la profusion des enseignes lumineuses siglées McDonald’s, Burger King et Pizza Hut, en constatant la quantité de sirop de fructose-glucose contenue dans un litre de Coca-Cola, en découvrant l’affluence aux buffets à volonté et les invitations permanentes des restaurants à manger à prix sacrifié, j’avais mis le doigt sur la réalité d’une crise en devenir. Car, à Rio Grande City, un quart des enfants de moins de cinq ans sont obèses et près de la moitié de ceux âgés de dix ans, suivant l’exemple de leurs parents, s’affirment comme de sérieux candidats au diabète de type 2.

Je l’avais écrit alors, le border town2 ressemblait à un atroce laboratoire. Où l’on pratiquait une expérience ultime d’abêtissement des règles alimentaires. Certes, dans un combat perdu d’avance, quelques justes tentaient d’alerter l’opinion, de mettre en garde la population et les autorités, voix fluettes prêchant dans le désert et trop peu puissantes pour être entendues d’une société américaine dominée par les géants de l’industrie agroalimentaire.

C’était en 2006. Depuis, Rio Grande City, son accent hispanique et son odeur de graillon n’ont cessé de hanter mon esprit.

Si depuis j’ai avancé sur des chemins bien différents, il m’est arrivé de revenir sur ces terres familières. Ainsi, en 2007, pour un Envoyé Spécial consacré aux acides gras-trans. Mais c’est surtout l’audience rencontrée par Toxic, en France et au Québec, ainsi que les courriers et e-mails de lecteurs profondément touchés qui m’ont interpellé.

Tout au long de la rédaction de Toxic, une vérité m’avait habité : j’étais un père scandalisé. Et le sang qui bouillonnait en moi avait nourri l’encre de mes mots.

Cette sincérité, cette volonté citoyenne de s’engager pour assurer un avenir alimentaire meilleur à nos enfants, je l’ai retrouvée dans les nombreux courriers reçus. Un flux, preuve de la persistance du problème, qui ne faiblit pas.

J’ignore lequel d’entre vous, chers correspondants lecteurs, m’a convaincu de la nécessité de replonger dans les maux de notre alimentation et de poursuivre le sillon tracé par Toxic.

Peut-être est-ce Jacques, directeur de recherche en Suisse, effaré de découvrir les « causes de la dégradation de la santé publique » ? Peut-être est-ce Madeleine, une jeune Française tiraillée entre le soulagement de savoir et l’inquiétude devant la vérité ? Peut-être plutôt Nathalie, une mère de famille de Montréal décidée à repartir à la conquête des assiettes de ses deux fillettes et désirant savoir comment s’y prendre ? À moins qu’il ne s’agisse d’un des messages reçus d’Italie, des Pays-Bas, de Belgique ou de Corée du Sud, lesquels, malgré les distances, traduisaient tous des angoisses identiques, prouvant ainsi la globalisation du mal ? Pour tout dire, il est impossible de savoir tant c’est assurément chacune de vos lignes qui a contribué à la naissance de ce nouvel opus.

En revanche, je me souviens précisément du moment où, pour la première fois, l’idée de reprendre le flambeau porté dans Toxic est venue m’effleurer.

C’était sur le plateau de la version québécoise de l’émission Tout le monde en parle. Je venais d’expliquer à Guy A. Lepage, son animateur, que la crise mondiale d’obésité, au-delà des kilos en trop, était la face très visible d’un iceberg bien plus dangereux. Et que, sous la surface, dans les sombres profondeurs de l’océan de notre ignorance, là où l’opacité ne laisse plus passer la lumière, se cachait un autre monde redoutablement toxique. Et qui, pour le coup, nous concernait tous.

Tandis que Guy souhaitait en savoir plus, l’évidence venait de me frapper : si l’occasion se présentait, je savais désormais où plonger. »

La suite ……………..demain

 

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William Reymond remet le couvert.

Son passionnant livre Toxic permettait de mieux comprendre les causes structurelles de l’épidémie d’obésité.

Nous l’avons dégusté par petits articles quotidiens sur le site obesite-en-reseau.fr du 01 mai au 11 juillet.

mais, l’enquête du livre s’arrêtait à l’année 2007.

Toxic Food, la suite de Toxic, prend le relais et va jusqu’à fin 2009.

Je vous propose cette « saison 2 », en petits articles quotidiens à partir du 23 juillet 2013 à 8 heures.

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