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Extrait de Toxic Food, le livre de William Reymond :

 » Déclin.

Jamais l’expression ne m’a paru si juste.

L’Amérique, déjà difforme, est bien malade de sa toxic food.

Malade à en crever même.

Il faut le répéter encore et encore : l’obésité est uniquement la face visible du mal. Pour mesurer l’ampleur de la crise, il faut plonger dans la liste des dix principales causes de décès aux États-Unis. Et constater que les dégâts liés au mode alimentaire américain trustent ce terrifiant palmarès.

En première place figurent toujours les maladies cardiaques, dont la majorité découle d’une nourriture trop riche en sucres, graisses, sel et… produits industriels. Viennent ensuite les cancers, pour beaucoup – nous le verrons – déclenchés par des facteurs environnementaux où l’alimentation occupe une place de choix.

Plus étonnant, les soins médicaux arrivent à la troisième place de cette liste. Près de 110 000 Américains décèdent en effet chaque année des effets secondaires d’un médicament.

Quel rapport avec la toxicité de l’alimentation ? Il est simple et compliqué à la fois.

Le premier niveau d’explication est lié à notre attitude face à la maladie. Nos sociétés – et pas seulement de l’autre côté de l’Atlantique – ont pris la mauvaise habitude de vouloir trouver une réponse médicamenteuse à tous les problèmes nés du contenu de nos assiettes. Résultat ? L’hypertension, le cholestérol, le diabète et autres tracas suscités par la nouvelle malbouffe sont presque exclusivement traités via des prescriptions médicales. Ce qui fragilise l’organisme et n’est pas sans répercussions sanitaires. Le recours aux « solutions » apportées par l’industrie pharmaceutique chez des patients de plus en plus jeunes entraîne en effet à terme une surconsommation permanente de pilules et autres cachets. Or ce sont ces malades-là, ceux qui jonglent avec les gélules et ajoutent malgré eux du chimique à une nourriture déjà saturée de ce genre de substance, qui apparaissent en tête de liste des décès surprenants.

Le second aspect de l’explication, plus complexe, touche à la sorte d’« abandon psychologique » que crée ce recours aux prescriptions comme solution miracle. Il est ainsi fréquent de voir des malades, rassurés par la « béquille » d’une poignée de pilules en cas de problème, continuer à engouffrer la nourriture industrielle à l’origine de leur mal. Des consommateurs qui, malgré leur traitement, meurent du fléau que la prescription était censée soigner.

Hélas ! cette réalité ne se limite pas à une simple « cohabitation », à une corrélation entre médicaments et toxic food. Typiquement américain, il s’agit plutôt d’un phénomène souvent poussé à l’extrême.

Au total, lorsque l’on ajoute les infections en milieu hospitalier, les erreurs de diagnostic et les interventions chirurgicales, près de 250 000 Américains décèdent chaque année après des soins médicaux.

Chandler, en Arizona, malgré son festival annuel de l’autruche (dans les années 1910, Chandler était un centre important d’élevage d’autruches, leurs plumes étant recherchées pour décorer les chapeaux des Américaines) et différentes installations du géant de l’électronique Intel, ressemble à des centaines de villes américaines. Celles que les touristes ne visitent jamais. Et pour cause : ici les longues avenues n’ont aucune âme, les chaussées sont défoncées et les panneaux publicitaires pullulent dans une complète anarchie. Chandler est située au sud-est de Phoenix mais pourrait se trouver à proximité de Dallas, Chicago, Los Angeles ou Pittsburgh. On en vient à se dire que traverser l’Amérique, c’est un peu être condamné à vivre, jour après jour, la même expérience. Renforçant cette impression, on remarque en effet les mêmes enseignes commerciales que partout ailleurs. Et, plus particulièrement, celles, criardes, de la restauration.

Comme à Rio Grande City, toutes les marques de junk food se sont données rendez-vous à Chandler. Toutes et une autre. Un cas unique. Un voyage vers le futur.

Situé à l’arrière d’une station-service, le Heart Attack Grill ( Littéralement « le grill de la crise cardiaque ») ne s’offre pas au conducteur lambda installé derrière son volant. Ici, aucun panneau publicitaire ne promet un éden alimentaire. Il n’y en a pas besoin, à vrai dire, puisqu’on vient dans l’établissement de Jon Basso en connaissance de cause. Son chiffre d’affaires imposant fait autant la réputation des lieux que son slogan choc : Heart Attack Grill, un goût bon à en mourir.

On pourrait sourire, mais Basso ne plaisante pas. Comme il le proclame fièrement sur sa devanture en forme de mise en garde, la nourriture vendue ici est « mauvaise pour la santé ». Et l’inventeur du concept sait de quoi il parle : ancien nutritionniste puis gérant de salles de sport, il a compris, en 2005, qu’il y avait plus d’argent à gagner à flatter les mauvaises habitudes alimentaires des Américains qu’à tenter de les corriger.

Son restaurant, unique en son genre, est né de ce constat. Et son menu l’illustre à merveille, si je puis dire. À cause des énormes hamburgers qui ont fait la réputation du lieu, mais aussi du reste.

Les boissons d’abord.

Le Heart Attack Grill est l’un des rares fast- foods vendant de l’alcool. De la bière bien sûr, mais aussi des produits beaucoup plus forts.

Ensuite, il y a le Coca-Cola. Importé du Mexique voisin, le soda est proposé dans sa version pur sucre. Car, comme l’explique Jon, les produits à base d’edulcorants sont bannis. Non parce que Basso s’inquiète de leur composition chimique, mais parce que, dit-il, plus pauvres en calories, ils ne correspondent en rien à la philosophie des lieux.

Depuis peu, une nouveauté est apparue : le Jolt Cola. Cette boisson, sorte de Coke sous amphétamines, est le soda le plus riche en caféine du monde. Déconseillé aux enfants, femmes enceintes et personnes âgées, le Jolt est réputé pour le coup de fouet, les frissons et tremblements qu’il procure.

La suite est à l’avenant.

Le menu créé par Basso propose par exemple des… cigarettes. Qui, bien entendu, conformes au discours de l’établissement, sont vendues uniquement sans filtre.

Les frites ne sont pas en reste. Disponibles à volonté en self-service, elles sont fort généreusement saupoudrées de sel. De plus, gratuitement, le client peut les recouvrir de fromage fondu. Mais c’est en cuisine que ces pommes de terre ont subi leur pire modification. Au Heart Attack Grill, les flatliners fries ne sont en effet pas cuites dans le traditionnel bain d’huile mais uniquement dans du saindoux !

Le saindoux, le Heart Attack Grill en consomme plus de deux cents kilos par semaine. Car, en plus des frites, Jon en met dans ses trois cent cinquante hamburgers vendus quotidiennement. Chaque pain se voit ainsi badigeonné de gras de porc rendant le produit final encore plus fondant.

Les hamburgers sont donc le plat de résistance du restaurant.

Il en existe quatre modèles. Dont le plus cher et gros frôle les treize dollars et atteint les… huit mille calories. Non, non, il ne s’agit pas d’une erreur de frappe. Chez Jon, le « quadruple » – c’est son nom – offre l’apport calorique conseillé à un homme adulte pour trois jours. Les mensurations du monstre sont à la hauteur du massacre diététique. En plus de ses deux brioches au saindoux, il contient huit tranches de fromage et quatre steaks hachés d’un poids approchant le kilo de viande. Un oignon – que l’on peut commander frit – vient agrémenter le tout. Autre option : vingt-quatre tranches de bacon…

Seules les quelques feuilles de salade habituelles à la recette du hamburger manquent à l’appel. Non par oubli ou erreur mais parce que Jon a décidé, et revendique, de commercialiser le pire de la junk food. Et uniquement cela.

Basso vend également différents t-shirts souvenirs hautement revendicatifs. Point commun entre tous, aucun n’est fabriqué dans une taille inférieure au XXL et tous sont disponibles jusqu’en taille 10XL.

Cette promesse, cet engagement même de commercialiser le pire de la junk food, ainsi que les risques sanitaires qui les accompagnent, sont au cœur de la stratégie de Basso. N’a-t-il pas imaginé un décor pour son petit restaurant de quarante tabourets qui ressemble à une salle d’hôpital ?

Ici, les serveuses sont en effet des « infirmières ». Qui revêtent l’uniforme, une tenue blanc et rouge agrémentée d’un décolleté profond pour séduire la clientèle essentiellement masculine. Les clients pour Jon – qui porte, lui, une blouse blanche et se fait appeler docteur – sont des « patients ». Et leur commande, une « ordonnance ».

Le gimmick médical est utilisé jusqu’à la nausée. À la fin du repas, les infirmières prennent souvent la tension du patient. Il faut reconnaître, ceci dit, qu’engouffrer l’équivalent de neuf repas en une dizaine de minutes affecte terriblement l’organisme. C’est pour cela du reste que les patients sont raccompagnés en fauteuil roulant jusqu’à leur voiture !

Quant aux noms des hamburgers, ils sont à l’avenant. Le simple s’appelle le « pontage » et, logiquement, le monstre aux huit mille calories le « quadruple pontage ».

Ces appellations ne relèvent pas seulement de la bonne idée marketing. Car les noms des burgers du Grill sont à la hauteur des risques encourus. Comme le dit Basso, sourire aux lèvres : « Si vous mangez chez moi tous les jours, cela va vous tuer. »

La remarque fait sourire les « patients ». Ici, chacun semble assumer le plaisir de se nourrir à l’extrême et classe le conseil du « docteur Jon » dans la catégorie des boutades.

De fait, la clientèle du Heart Attack Grill est en majorité constituée d’habitués. Et d’obèses. Qui, bien souvent, mangent gratuitement. Pourquoi ? Parce que s’il le désire chaque patient se voit pesé à son arrivée. Et, s’il dépasse les cent soixante kilos, devient l’invité de Basso.

Reste que les hamburgers trop grands pour tenir dans une main et les clients à deux doigts de vomir, le front luisant de transpiration et les joues barbouillées de saindoux, ne sont pas ce qu’il y a de plus choquant dans le petit restaurant de Chandler, Arizona.

Non, comme un affreux écho à ce que j’écrivais plus haut, le plus scandaleux, c’est de constater que les « patients » de John avalent des pilules avant de se lancer à la conquête de ces Everest du pire.

La clientèle du Heart Attack Grill, malade à en mourir, se dope en effet aux médicaments anti-cholestérol et autres régulateurs de tension dès qu’elle met un pied dans l’établissement. Une sorte d’antidote – fictive – avant de s’abandonner sans remords à un orgasme de gras.

Jon Basso est un entrepreneur ambitieux. Ayant découvert, grâce à ses anciennes activités, la pandémie d’obésité, il en connaît les mécanismes et, aujourd’hui, les transforme en recettes de son propre succès. Un succès que le « bon docteur » songe à développer, étendre même. Aux États-Unis, bien entendu, vaste territoire. Mais Basso a une autre idée en tête. Sachant que la polémique est un solide vecteur de ventes, il vise quelques villes emblématiques. Au programme, Hollywood, La Nouvelle-Orléans et Rio de Janeiro. Et, si tout fonctionne comme prévu, dans quelques années Amsterdam et… Paris.

Bon appétit. »

La suite …………….demain.

Dr BUENOS : Les USA nous fascineront toujours par leur démesure. Mais au delà du côté original et bien pensé du Heart grill attack, on voit apparaître une dimension désespérée, voire suicidaire qui elle, est effrayante.

 

 

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2 réponses à Le Heart attack grill

  • Laurence dit :

    J’ai vu un reportage sur ce restaurant il y a quelques années. J’ai retrouvé un extrait sur You tube : http://www.youtube.com/watch?v=HO0hKO2shEE
    C’est à peine croyable…

  • Nathalie dit :

    C’est effectivement à peine croyable que ce médecin retourne sa veste de manière si spectaculaire. Cela donne la nausée de voir ces débordements de « bouffe ». Comment les clients font-ils pour ne pas fuir loin de cet endroit dans lequel ils risquent leur vie à chaque hamburger englouti?

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