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Extrait de Toxic Food, le passionnant livre enquête de William Reymond :

 » Le Heart Attack Grill relève, certes, de l’aberration. De l’expérience ultime. Mais le restaurant de Jon Basso est loin d’être un cas isolé. Et si cet entrepreneur de Chandler a pris soin de déposer sa marque, ce n’est pas pour rien. Il sait combien la mentalité du « Je mange ce que je veux » qui garantit son succès gagne le territoire américain. La tendance ne se limite pas aux hamburgers gargantuesques. Désormais, le format géant se décline en effet dans tous les registres culinaires.

C’est une différence majeure entre l’Amérique alimentaire décrite dans Toxic et celle constatée aujourd’hui. Bien sûr, à l’époque, je mentionnais déjà l’émergence de la pornography food tandis que McDonald’s, Burger King et consorts renonçaient à la portion de frites grande taille et renforçaient leurs gammes de salades.

Mais, entre-temps, comme le reste du monde, l’Amérique est entrée en récession. Or – bien que cela surprenne – augmenter la taille des plats est un symptôme de crise. Alors que le consommateur dépense avec prudence, annoncer lui « en donner pour son argent » relève de la combinaison gagnante. Aussi, en plus des restaurants proposant des plats géants, les grandes chaînes de fast-foods elles-mêmes agrandissent les portions. Avec discrétion, bien sûr, tant se lancer dans la surenchère calorique alors qu’on essaie parallèlement de rejeter toute responsabilité dans le développement de l’obésité n’est pas politiquement correct, mais la vérité est là. Désormais, de McDonald’s à Wendy’s en passant par Burger King et Whataburger, tous proposent au moins un sandwich de taille conséquente. Un geste qui, finalement, ne coûte guère plus mais rapporte bien davantage en assurant un taux de clientèle élevé.

Les répercussions de ce revirement dépassent le seul cadre de la restauration. Dans les rayons congelés des supermarchés, des produits avec package XXL sont apparus pour séduire la clientèle masculine. Début 2009, même la télévision a suivi le mouvement. Avec, le mercredi soir, sur Travel Channel, deux numéros de Man vs Food (Littéralement «L’homme contre la nourriture»).

Le concept est simple mais efficace. Chaque semaine, Adam Richman part à la découverte d’une nouvelle ville des Etats-Unis. Non pour mettre en avant le patrimoine culturel ou historique, mais pour pousser la porte des restaurants et affronter un plat géant. Comme s’il entreprenait un défi sportif, Richman tente l’impossible : terminer les plats proposés dans un délai imparti assez bref. Or, qu’il s’agisse d’un dessert pesant près de deux kilos à San Antonio, d’une pizza de six kilos à Atlanta, d’une omelette réalisée avec une douzaine d’œufs à Seattle ou d’une saucisse d’un mètre à Minneapolis, l’homme terrasse quasiment toujours la nourriture.

À noter, parmi les échecs d’Adam, terminer un milkshake de 3 litres et demi. Une épreuve qui s’est achevée dans le… vomi.

Alors que l’Amérique est malade de son poids, Man vs Food obtient un beau succès d’audience. Mieux, l’émission est devenue le programme le plus regardé de Travel Channel et pousse la concurrence à inventer des shows autour de l’excès de malbouffe.

Gag, détail, épiphénomène ? Peut-être. Mais n’oublions jamais que les États-Unis jouent, pour le meilleur et souvent le pire, un rôle de précurseur. Et que nos habitudes alimentaires n’échappent pas à la règle et se voient, peu à peu, gagnées par ses influences. Si l’ère des repas géants n’a pas débuté de ce côté de l’Atlantique, elle commencera sans doute si la crise économique s’installe. La preuve ? Déjà en Angleterre, en Pologne et en Allemagne, des établissements proposent des spécialités locales en versions extra-larges.

Si le cas du Heart Attack Grill me semble symptomatique, ce n’est pas seulement parce qu’il dessine – en les exagérant – les lignes d’un cauchemar alimentaire futur. Selon moi, il illustre parfaitement le délire paroxystique américain, où des consommateurs malades condamnés à prendre chaque jour des médicaments refusent de renoncer aux causes de leurs maux.

Cet état d’esprit peut nous choquer, mais il correspond bien à la société américaine. Ainsi, les publicités ventant des comprimés contre le cholestérol, du sirop contre les digestions difficiles et des adresses de restauration rapide encadrent les programmes style Man vs Food. Dès lors, habitué à une réponse chimique ou médicale à ses maux, l’Américain espère une solution miracle et facile à avaler. Et n’a pas envie de changer sa façon de manger.

Or son mode alimentaire, comme nous l’avons vu, le conduit précocement vers la tombe !

Pire, après les maladies cardiaques, les cancers et la surconsommation de médicaments, la quatrième cause de décès est, elle aussi, liée au « régime américain ». Il s’agit des accidents vasculaires cérébraux.

Si une attaque cérébrale peut naître pour des raisons génétiques ou être liée à une maladie spécifique, son principal facteur de risque réside dans une mauvaise hygiène de vie. Or l’obésité, en créant de l’hypertension artérielle, est la principale cause des attaques vasculaires cérébrales. En France, les AVC sont même la troisième cause de décès après les cancers et les problèmes cardiaques. Et la première cause des handicaps physiques acquis.

Au milieu de ce sinistre classement, les problèmes respiratoires chroniques précèdent les victimes d’accidents. Si le mode alimentaire américain n’est évidemment pas directement responsable de ces chiffres, il constitue, une fois encore, un facteur aggravant. Toute victime d’accident ou d’insuffisance respiratoire multiplie ses risques de décès si elle est obèse.

De fait, beaucoup des personnes décédées durant la première vague de contamination de la grippe A Hl/Nl en 2009, tant côté américain que mexicain, se trouvaient en surpoids. L’obésité avait entraîné une série de complications fatales.

Le mode alimentaire américain est en outre largement responsable des morts liées au diabète, sixième cause de décès, qui augmentent de manière vertigineuse chaque année. Or, comme je le racontais déjà dans Toxic, nos assiettes sont les responsables majeures de cette maladie qui atteint des victimes de plus en plus jeunes.

Les décès liés aux grippes et pneumonie, puis ceux dus à la maladie d’Alzheimer, concluent ce classement macabre. Dans ces deux catégories, il est malheureusement encore possible de constater les dégâts d’un mode alimentaire destructeur. Parce qu’une partie des victimes de la grippe atteintes de maladies respiratoires trépassent à cause du surpoids. Et parce qu’Alzheimer, à l’instar de toutes les maladies neurologiques, est également un fléau parfois dépendant de facteurs environnementaux parmi lesquels figure l’alimentation industrielle.

On le voit : les dégâts liés au régime américain sont omniprésents dans ce classement. Ce qui, à l’échelle des nations, produit un effet redoutable. En 2000, mesurant et comparant l’état de santé et l’espérance de vie des habitants de cent quatre-vingt-onze pays, l’OMS plaçait les États- Unis, pourtant première puissance mondiale, seulement à la vingt-quatrième place. L’espérance de vie d’un enfant né en 1999 y était évaluée à 67,5 ans, contre 74,5 ans pour un bébé japonais – la première marche du podium. La France arrivait, elle, juste après l’Australie, dans le trio de tête.

En soi, ces informations démontrent les effets désastreux de l’industrialisation de la nourriture. Mais, afin de faire vaciller les sceptiques, il faut aller à la rencontre des trois autres phénomènes qui prouvent l’ampleur d’un risque nous concernant tous.

NB : L’ensemble de ces chiffres et classements proviennent des statistiques officielles du gouvernement américain.   »

La suite ………….. demain.

Dr BUENOS : Dans le précédent article, nous évoquions une conduite suicidaire individuelle, dans celui-ci, ne s’agit il pas d’une conduite suicidaire collective ?

 

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