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Extrait de TOXIC, le livre de William Reymond :

« Jamais personne n’avait osé une telle comparaison. Dans une Amérique traumatisée par les attaques du 11 septembre 2001, son propos semblait relever du tabou. Mais voilà, à trois mois de la fin de son mandat, il ne risquait plus grand-chose. Richard Carmona s’approcha du micro. Une dernière fois, son regard balaya l’auditoire. La salle de l’université de Caroline du Sud était bondée. Mais du Viêtnam aux coulisses du pouvoir, le vice-amiral avait connu bien pire. Lui, le dix- septième Surgeon General de l’histoire des États-Unis, savait qu’il était en train de perdre cette bataille.

« Lorsque nous nous penchons sur notre futur et regardons où en sera le taux d’obésité dans vingt ans, les questions qui apparaissent sont alarmantes. D’où viendront nos soldats, nos marins et nos pilotes ? D’où viendront nos policiers et nos pompiers alors que notre jeunesse suit une trajectoire qui fera d’elle une génération d’obèses, écrasée par des problèmes cardio-vasculaires, rongée par le cancer et une multitude d’autres maladies une fois qu’elle aura atteint l’âge adulte ? »

Le moment d’assener sa conclusion iconoclaste arriva : « Cette vérité-là nous menace tout autant que le danger terroriste que nous connaissons aujourd’hui…

L’obésité est une attaque terroriste nous dévastant de l’intérieur ».

Un murmure parcourut l’assistance. Carmona s’interrompit un court instant. Il savait que le plus dur venait.

« Et si nous ne faisons rien, la magnitude des conséquences de cette menace dépassera largement le 11 Septembre ou toute autre attaque terroriste. »

Si les propos de Richard Carmona sont forts, surtout au sein d’une administration qui préfère utiliser le vocable « terroriste » à des fins politiques, ils ne correspondent toutefois pas à la réalité. Ou, pour être plus précis – et c’est d’autant plus angoissant -, le Surgeon General a vingt ans de retard. Environ 3 000 personnes, dont 2 752 rien qu’à New York, sont décédées durant les attentats du 11 septembre 2001. La même année, 400 000 Américains mouraient, victimes de la pandémie d’obésité. Soit l’équivalent de 145 fois la chute des tours du World Trade Center.

2001 est à vrai dire une année clé dans la jeune histoire de la pandémie d’obésité. Pour la première fois aux États-Unis, le nombre de décès lié à une mauvaise alimentation et au manque d’activité physique dépassa celui dû au tabac. Et prit la première place de ce pénible palmarès. Une tendance qui, là encore, n’est pas prête à ralentir. En réailité, une étude entreprise par Ali Mokdad, chercheur des CDC, et publiée par le prestigieux Journal of the American Medical Association, prouve qu’avec le vieillissement de la population, la mortalité directement liée aux problèmes de poids devrait atteindre des proportions considérables dans les dix années à venir.

L’obésité est donc la première cause de décès aux États-Unis. L’information s’avère d’autant plus étonnante qu’elle semble avoir été complètement ignorée par le radar de nos émotions et absente des critères de sélection

médiatiques. Les morts par accident de voiture occupent une place bien plus importante dans nos peurs et préoccupations collectives alors qu’en 2000 la route faisait dix fois moins de victimes.

Prenez une autre obsession américaine : les armes. Tandis que 400 000 Américains décédaient sous les effets de la graisse, « seulement » 29 000 autres tombaient sous les balles.

Dernier exemple, terriblement ancré dans la liste des maux de ces trente dernières années. 17 000 Américains meurent tous les ans d’overdoses. La drogue, pourtant installée si haut dans le panthéon de nos phobies, fait donc figure de naine face aux ravages de l’obésité.

En réalité comme le démontre Mokdad, deux tiers des décès américains sont désormais directement et indirectement liés à la pandémie d’obésité.

Imaginons donc un instant que plus de la moitié des morts d’une nation résultent d’une série d’assauts terroristes. Porté par une réaction populaire justifiée, le gouvernement de Washington déclarerait immédiatement la guerre à ce mortel ennemi. Mais là, rien. Ou si peu. Alors, la parabole utilisée par Richard Carmona est-elle outrancière et son parallèle choquant ? Même pas. Car la vérité s’avère bien pire.

 

la suite ….. demain

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