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surproduction

Extrait de Toxic, le livre de William Reymond. Nous allons enfin commencer à faire le lien entre la politique américaine des années 70 et la pandémie d’obésité.

 » La crise offrit à Butz l’opportunité de mettre en œuvre sa vision. Celle qu’il prônait depuis vingt ans et où se bousculaient production massive, modernité, consolidation, concentration et centralisation.

Butz avait été clair. Si elle voulait survivre, l’agriculture américaine devait entamer une profonde mutation. Mettant à terre cinquante ans de contrôle de la production, des stocks et des prix, le patron de l’USDA souhaitait que les fermiers américains se lancent dans l’agriculture de masse. Une nouvelle donne où le petit propriétaire n’aurait plus sa place. Il fallait « devenir gros ou disparaître ». Pour Butz, l’agriculture du XXe siècle s’apparentait à des champs uniformes, cultivés au maximum de leurs capacités, dont le rendement serait poussé grâce aux techniques modernes, allant du tracteur hautes performances à l’usage massif d’herbicides, pesticides et autres engrais chimiques. Cette modernisation forcée s’avérait financièrement insupportable pour la majorité des agriculteurs, mais peu lui importait : à ses yeux, seul comptait le sort de l’Amérique. Et puis, si les fermiers ne pouvaient pas assumer les changements nécessaires, les grands groupes agroalimentaires seraient ravis de prendre la relève.

En 1960, l’Amérique comptait 5,4 millions de propriétés agricoles d’une superficie moyenne de 216 acres. En 1974, un an après le déclenchement du plan Butz, alors que la superficie moyenne doublait, on n’en dénombrait plus que 2,3 millions. Et aujourd’hui, on frôle la barre des 2 millions, la majorité n’hébergeant plus des fermiers mais des « opérateurs », employés smicards de grands groupes qui pratiquent une monoculture intensive.

En 1970, 9 % des Américains produisaient de la nourriture pour le reste de leurs concitoyens. En 2005, la même tâche occupe 2 % de la main-d’œuvre nationale.

Les effets de la révolution initiée par Butz se mesurent dans tous les secteurs. La moitié de la production de volailles, des œufs à la viande, appartient à quatre groupes, qui centralisent 80 % de celle-ci dans deux États, la Pennsylvanie et le Texas. Quatre autres compagnies, DuPont, Dow Chemical, Novartis et Monsanto, contrôlent, elles, 75 % des ventes de graines de maïs.

Enfin, seulement six compagnies monopolisent la presque totalité de la production de grains, du maïs au soja, en passant par le blé.

Finalement, le raz-de-marée déclenché par Butz pouvait paraître pour le moins cocasse. Comme s’il s’était inspiré de la centralisation communiste, à laquelle il aurait ajouté un solide parfum de capitalisme, il avait élaboré un système confiant l’appareil de production alimentaire à une poignée de sociétés. Mais en agissant ainsi, il s’était débarrassé de l’incertitude : les stocks ne dépendraient plus de millions de petits agriculteurs, des conditions météorologiques ou des capacités financières de chacun à acheter suffisamment de pesticides. Non, en offrant le futur de la nourriture à quelques puissantes sociétés, il avait garanti au pays la certitude d’aliments toujours disponibles et à bas prix. Plus jamais une mère de famille ne serait obligée d’acheter de la viande au marché noir ; plus jamais l’Amérique ne se coucherait le ventre creux. La production de masse garantissait l’abondance à bon marché. Et les milliards de dollars de subventions assureraient que cet état de fait dure longtemps.

Earl Butz était en somme un génie dans son genre. Grâce à lui, l’Amérique se précipita dans ses supermarchés. La machine se mit à tourner à plein régime et les stocks atteignirent des sommets jamais atteints. Il restait toutefois un problème à élucider : qu’allaient devenir ces millions de tonnes de grains supplémentaires à bas prix ?

Dans la réponse se dissimule le secret de la pandémie d’obésité. »

La suite ….. demain.

 

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