Une étude parue dans la revue « Pediatrics » souligne que les enfants en surcharge pondérale sont victimes des quolibets de leurs camarades mais aussi d’adultes et notamment de leurs parents. Comment transformer cette inquiétude parentale en soutien moral ? Réponse avec Patrick Tounian, chef du service de nutrition pédiatrique de l’hôpital Armand Trousseau.
Une étude souligne que les enfants en surcharge pondérale sont victimes des quolibets de leurs camarades et de leurs parents (SIPA).
Les personnes obèses sont de plus en plus victimes de remarques désobligeantes. Plus l’obésité est médiatisée, plus il semble que la stigmatisation s’accroît. Ainsi, les enfants obèses sont, en raison de leur poids, mis à l’écart dans les écoles mais aussi dans leurs propres familles. Et, à cause de ces remarques verbales, leur souffrance ne fait que s’amplifier.
La surcharge pondérale vécue négativement
Certains parents, persuadés que leur enfant est gros parce qu’il mange mal, ne supportent pas que leur progéniture véhicule cette image de mollesse, de malbouffe et de mauvaise prise en charge parentale. Car l’idée commune qui circule dans notre société est qu’un enfant est gros parce que ses parents s’occupent mal de lui.
Le surpoids de l’enfant provoque donc chez les parents à la fois culpabilité et énervement. J’ai ainsi entendu plusieurs fois en consultation des parents s’exclamer, en présence de leur enfant, « il mange n’importe quoi », « il ne bouge pas », « je t’avais dit qu’il ne fallait pas te resservir » ou « il faut que tu arrêtes de regarder autant la télé ».
Suivant la corpulence du parent, les remarques n’ont pas la même origine. Un parent mince ne comprend pas pourquoi son enfant est gros. Il croit rester mince parce qu’il fait attention à ce qu’il mange et va donc critiquer franchement son enfant. En revanche, un parent plus gros aura tendance à blâmer son enfant pour tout écart de régime parce qu’il craint qu’il subisse le préjudice qu’il a lui-même subi plus jeune, à savoir le mépris de ses condisciples.
Le problème, c’est que cette incompréhension ou inquiétude des parents ne fait qu’amplifier la souffrance de l’enfant. Le regard est autres, camarades de classe, professeurs de sport ou même parents, lui rappelle sans cesse qu’il est en surpoids, et ce de manière négative.
Dédramatiser l’obésité, diminuer la souffrance
C’est pour cela que lorsque j’accueille une famille, je demande aux parents pourquoi, selon eux, leur enfant est obèse. Souvent, j’entends la rengaine obésité-mauvaise hygiène de vie : ils me répondent que c’est parce qu’il mange trop, qu’il n’aime pas le sport. Ils déversent ainsi ce qu’ils ont sur le cœur.
Et moi je les informe, je leur explique que l’obésité est une maladie, à priori en grande partie génétique. Avant de faire maigrir un enfant, il faut expliquer d’où vient cette tendance au surpoids pour déculpabiliser et dédramatiser.
Ce n’est que comme ça que les « ne te ressers pas » à table ne signifieront pas « arrête de manger, tu es gros » mais « tu ferais mieux de ne pas te resservir car du fait de ta constitution tu auras tendance à grossir ». Si la phrase reste la même, le ressenti de l’enfant sera différent.
Ainsi, en modifiant l’image de l’obésité, déjà au sein des familles mais également dans l’ensemble de la société, on permettra aux enfants obèses d’être moins la cible de quolibets. Les enfants qui ont du diabète insulino-dépendant par exemple sont moins stigmatisés que les obèses par leurs camarades, car n’est pas associée à cette maladie une image de fainéantise et gourmandise excessive. En faisant comprendre que l’obésité est une maladie, on peut diminuer la souffrance des obèses. Et commencer sur des bases sereines le traitement.
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