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Extrait du livre Toxic, de William REYMOND :

« Nikhil Dhurandhar n’avait jamais vu quelque chose de semblable : des cadavres de poulets franchement gras. Des volailles qui, une fois disséquées, révélaient un foie bien plus gros que la norme. Et des reins eux aussi d’une taille impressionnante. Ce constat, il l’avait fait à Bombay, au milieu des années 1980, quand des centaines de milliers de poulets mourraient infectés par un adénovirus, le SMAM.

Mais plus que le virus, c’est l’aspect des cadavres qui l’avait intrigué. Alors que normalement un animal atteint d’un adénovirus dépérit avant de s’éteindre, les poulets, ici, semblaient quasiment… obèses.

Il y avait encore plus troublant. Chaque fois que Nikhil Dhurandhar injectait le SMAM à des volatiles sains, ceux-ci suivaient la même courbe d’évolution. Avant de mourir, les oiseaux grossissaient. Le scientifique indien en fut presque sûr, grâce à une épidémie touchant les poulets de Bombay, il venait, quasiment par hasard, d’isoler un virus à l’origine de la pandémie d’obésité. Il lui fallait maintenant poursuivre ses recherches à plus grande échelle. Mais pour y parvenir, un choix s’imposait à lui. Si, effectivement, il avait mis la main sur le saint Graal des temps modernes, sur l’explication capable d’enrayer le mal gagnant la planète, l’Inde ne lui suffisait plus. Nikhil Dhurandhar devait rejoindre Fat Land et ses dizaines de millions d’obèses.

Aujourd’hui, Nikhil Dhurandhar poursuit ses expériences de recherche biomédicale en Louisiane, mais c’est au sein des laboratoires de la Wayne University de Detroit, dans le Michigan, qu’il a d’abord essayé de confirmer son intuition. En ayant même reçu, indirectement, un coup de pouce des autorités sanitaires locales. Les États-Unis interdisant l’importation de souches de virus, l’Indien a en effet pu puiser dans celles disponibles en Amérique.

C’est ainsi qu’il est passé du SMAM à l’adénovirus Ad-36, lequel ne manque pas de points communs avec celui qui avait décimé les élevages avicoles indiens. Et qu’il obtint les mêmes résultats : avant de mourir, les poulets et les singes infectés par l’Ad-36 prenaient du poids. Certains voyaient même leur masse constatée en début d’expérience tripler, tandis que la proportion de graisse de leur organisme doublait !

Il aurait fallu oser aller plus loin, mais, comme on s’en doute, des questions éthiques s’y opposèrent. Nikhil Dhurandhar ne pouvait infecter des humains et attendre de voir si, en dépérissant, ils prenaient des kilos supplémentaires.

Il convenait donc de trouver une autre option. L’idée émergea, simple. Dhurandhar décida de comparer 500 échantillons sanguins afin de déterminer lesquels portaient l’adénovirus que l’on trouve naturellement parmi la population. En les séparant en deux groupes, d’un côté les obèses et de l’autre les sujets proches de leur poids de forme, l’Indien obtint des résultats incroyables. Seulement 5 % des personnes sans problème de poids s’avéraient porteuses de l’Ad-36. Mais la proportion montait à 30 % chez les obèses.

Nikhil Dhurandhar en était maintenant persuadé, il avait vraiment découvert le virus de l’obésité !

« Le concept d’un virus qui causerait l’obésité est tellement éloigné de ce que l’on croit, que je comprends les difficultés de certains à admettre les conclusions de mes travaux. » Dhurandhar sait que, pour convaincre, il lui faudra plus que des études et des conclusions que d’aucuns peuvent réduire à une coïncidence statistique. Du reste, avec du recul et de la mesure, il modifie légèrement ses propos et certitudes initiaux : « Je ne dis pas, explique-t-il, que tous les cas d’obésité sont dus à ce virus, mais il pourrait y avoir certaines personnes pour lesquelles ce virus contribuerait à l’obésité ».

À l’heure actuelle, Dhurandhar travaille sur deux jumelles parfaites, Christyn et Beth. Jusqu’à leur entrée à l’université, ces sœurs ont suivi un développement physique quasiment identique. Seulement voilà, deux ans après son départ du domicile familial, Christyn a pris du poids. Et pas Beth. Or des tests sanguins ont démontré que Christyn était porteuse de l’Ad-36, mais pas sa sœur à la taille de guêpe.

Bien sûr, un tel écart semble donner du sens aux recherches de Dhurandhar. Pourtant, force est d »être très prudent. Notamment parce que personne n’a étudié ni comparé la vie des deux jumelles durant leurs vingt- quatre mois d’université. Peut-être Christyn s’est-elle simplement mise à manger plus et à faire moins d’exercice ! La réserve s’impose donc.

Ainsi, le professeur William Russell, virologiste à l’Université Saint-Andrew, spécialiste anglais des adénovirus, considère qu’aucun de ces virus n’a jamais été lié à des maladies à long terme comme l’obésité. « Les adénovirus ont la particularité de causer des infections à court terme et ensuite de disparaître de l’organisme humain. Il y a donc un antagonisme avec l’obésité qui est au contraire une maladie inscrite dans la durée. » Et dont on observe la croissance depuis plusieurs décennies.

Russell n’est pas le seul à émettre des doutes et à s’interroger quant à la réalité d’un virus de l’obésité. D’autres s’avouent même étonnés des motivations de Dhurandhar. C’est le cas du professeur Stephen Bloom de l’Imperial College de Londres : « Mais pourquoi a-t- on besoin, aujourd’hui, d’inventer une étrange histoire de virus ? »

Pourquoi ? La réponse se trouve sûrement dans les propos même de Nikhil Dhurandhar : « Il serait extraordinaire et formidable de mettre au point un vaccin qui préviendrait certains cas d’obésité virale. C’est en tout cas la direction de mes travaux. Mais il s’agit seulement pour l’instant d’un rêve. Et l’impact le plus important de mes recherches est ailleurs : mes travaux augmentent les chances de faire accepter l’idée que l’obésité est bien une maladie».

Et qui dit maladie, dit consultations, remèdes, médicaments et ordonnances. Ce qui est, pour certains chercheurs et laboratoires, l’équivalent de la recette du hold-up du siècle. »

La suite …… demain.

 

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