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L’exercice physique intense réduit la prise alimentaire: une solution contre l’obésité infantile?

« Bouger plus pour manger moins » !

Et si l’exercice physique ne permettait pas seulement d’augmenter sa dépense énergétique mais également de réduire ses apports? C’est ce que suggèrent les résultats du Laboratoire Clermontois AME2P (en collaboration avec le Laboratoire de Nutrition Humaine) mettant en avant l’effet anorexigène de l’exercice intense, qui diminue les apports énergétiques des adolescents sans affecter leurs sensations de faim.

Dans les années 1950, Mayer et al. ont souligné une possible interaction entre activité physique et prise énergétique. D’après eux, la prise énergétique d’un individu est régulée de manière si fine que la dépense énergétique induite par la pratique physique est compensée par une prise alimentaire. Depuis, de nombreuses études se sont intéressées au sujet et ont montré qu’il n’existe pas de réponse compensatoire aussi finement régulée, mais ces travaux insistent néanmoins sur le potentiel qu’a l’activité physique de moduler les apports caloriques.

Le contrôle alimentaire en réponse à l’activité physique a été décrit chez l’adulte, mais encore peu chez l’enfant. Les premiers travaux questionnant l’impact de l’exercice sur la prise alimentaire chez des enfants datent de 2004. Des jeunes filles minces de 9 à 10 ans ont réalisé deux exercices intenses à 75 % de leurs capacités maximales (un le matin et un l’après-midi) ou deux exercices modérés (50 % de leurs capacités). Les auteurs n’ont pas observé de modification de la prise alimentaire quotidienne totale mais une prise énergétique inférieure lors du repas de midi suite à l’exercice modéré. Depuis, quelques travaux similaires ont été conduits mais la grande diversité méthodologique observée entre ces études rend difficile quelque conclusion que ce soit.

Les débuts d’un programme de recherche spécifique

Ce manque de cohérence méthodologique a été souligné par une équipe qui a décidé de mettre en place un programme de recherche dédié à ces adaptations nutritionnelles en réponse à l’exercice physique, chez des enfants et adolescents minces et obèses. Ainsi en 2010 nous avons mis en place la première étude questionnant les effets d’un exercice aigu sur la prise alimentaire ad libitum (à volonté) d’adolescents obèses. Ils ont réalisé dans un ordre aléatoire deux sessions expérimentales en laboratoire.

Une première session « contrôle », au cours de laquelle leur prise alimentaire ad libitum aux repas de midi et du soir a été évaluée ainsi que leurs sensations d’appétit. Au cours de cette journée les adolescents n’ont réalisé aucune activité physique.

La seconde journée expérimentale nommée « Exercice » était identique à la première mais les adolescents ont dû réaliser un exercice intense (70% de leurs capacités maximales) sur bicyclette ergométrique en fin de matinée.

Si nos résultats ont souligné une légère, mais significative, diminution de la prise alimentaire lors du déjeuner, ils ont mis en avant pour la première fois une réduction encore plus marquée de cette prise énergétique lors du repas du soir. Si nos données montrent une modification involontaire de la prise alimentaire des adolescents obèses, elle n’est pas accompagnée d’altération de leur appétit. En d’autres termes, un exercice intense réalisé en fin de matinée permet de diminuer leur prise énergétique sans créer de frustration alimentaire.

Ce travail publié en 2011 (Physiology & Behavior) met en avant pour la première fois un effet anorexigène de l’exercice, pour autant il nous a semblé ensuite important de mesurer si tous les exercices ont le même impact ou si cela dépend des caractéristiques de réalisation (durée, intensité…).

Quel rôle pour l’intensité d’exercice

Ainsi un second protocole respectant la même méthodologie a été mis en place en collaboration avec le Laboratoire de Nutrition Humaine de Clermont-Ferrand (INRA) comparant les effets sur la prise alimentaire d’un exercice intense (75% des capacités maximales) et d’un exercice de faible intensité (40% des capacités maximales). Ici, 15 adolescents obèses ont dû passer 3 fois 24 heures en chambres calorimétriques (une session contrôle ; une session avec un exercice intense, et une session où l’exercice était de faible intensité). La chambre calorimétrique n’est autre qu’une chambre de type chambre d’étudiant, mais hermétique et permettant la mesure des échanges gazeux et ainsi le calcul de la dépense énergétique. Une nouvelle fois l’exercice intense a favorisé la réduction des apports énergétiques spontanés (toujours sans modification des sensations d’appétit), alors que l’exercice de faible intensité n’a en revanche pas affecté leur prise alimentaire.

Quid des adolescents minces ?

Alors que nos travaux n’avaient jusqu’à présent inclus que des sujets obèses, il semblait important de voir si le même effet pouvait être retrouvé chez leurs homologues normo-pondérés ou si cela relève de particularités physiologiques liées à leur pathologie. Nous avons mis en évidence en 2013 (Physiology & Beahavior) que cet impact anorexigène de l’exercice n’est observable que chez les adolescents obèses. Il semble donc que l’exercice intense puisse exercer une action correctrice sur les systèmes physiologiques de contrôle alimentaire, qui sont affectés par l’obésité, et ainsi lutter contre la surconsommation énergétique.

« Bouger pour manger moins » mais peut-on dire « bouger moins pour manger plus » ?

Pouvoir augmenter la dépense énergétique par l’exercice physique et favoriser simultanément une réduction de la prise alimentaire semble ouvrir aujourd’hui de nouvelles perspectives de prise en charge de l’obésité infantile par l’activité physique. Ces résultats peuvent également conduire à se demander si l’inverse est vrai… Est-ce que bouger peu (être sédentaire) favorise l’obésité uniquement par la faible dépense d’énergie générée ou cela induit-il aussi une réponse nutritionnelle ? En 2013, notre équipe a publié dans Journal of Developmental & Behavioral Pediatrics les premiers résultats relatant un effet orexigène (favorisant une augmentation de la prise alimentaire d’une des activités les plus sédentaires, l’alitement, chez de jeunes obèses. Ici, des adolescents ont dû rester alités durant trois heures le matin après leur petit déjeuner. Si les résultats ne montrent pas de différence de leur prise alimentaire au déjeuner, ils soulignent en revanche une forte augmentation au diner (sans altération de l’appétit). De nouvelles études sont aujourd’hui en cours au laboratoire AME2P questionnant les effets d’autres activités sédentaires comme les jeux vidéo passifs mais aussi actifs (nécessitant des mouvements du corps pour jouer), sur les apports énergétiques de jeunes normo-pondérés et obèses.

 Ces résultats mettent donc en avant que l’exercice physique intense permet non seulement d’augmenter la dépense énergétique d’un adolescent obèse, mais également de réduire ces apports alimentaires sans créer de frustration ni de faim. A l’inverse, les activités sédentaires entrainant une faible dépense énergétique semblent favoriser leur surcompensation alimentaire. Tout ceci suggère que contrairement aux idées reçues, l’exercice physique ne permet pas simplement de consommer des calories, mais a un double impact sur la balance énergétique, affectant à la fois les dépenses et les apports énergétiques.

Dr BUENOS : si ces constatations sont extrapolables aux adultes, cela veut dire qu’il faut pousser à favoriser la pratique d’activités physiques intenses (plutôt la marche nordique que la marche promenade).

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